A l’heure où on lit tout et n’importe quoi sur les conséquences du vote britannique en faveur du Brexit, le domaine de la propriété intellectuelle n’est pas épargné.
Les interrogations sur le sort du futur brevet unitaire, des marques de l’Union européenne et des modèles communautaires sont les premières qui viennent à l’esprit des spécialistes de propriété intellectuelle.
L’intérêt de ces titres réside dans leur effet unitaire, à savoir qu’ils produisent – ou produiront pour ce qui est du futur brevet unitaire – des effets uniformes sur l’ensemble des États membres.
S’agissant des marques de l’union européenne ou des modèles communautaires, qui sont délivrés depuis vingt ans (marques) et treize ans (modèles) par l’Office de l’Union européenne pour la Propriété Intellectuelle (EUIPO), on comprend aisément que le retrait de l’un des États conduise à s’interroger sur le sort des droits acquis par les titulaires de ces marques et modèles.
Ce sort sera assurément réglé par un accord entre le Royaume Uni et l’Union européenne, à l’instar de la myriade d’autres problèmes soulevés par le Brexit dans de nombreux domaines.
Pour anticiper les contours de ce futur accord, pourquoi ne pas s’inspirer des scénarios intervenus lors de l’accès à l’indépendance des républiques de l’URSS et de la Yougoslavie ?
Le schéma est le même : les marques enregistrées en URSS ou en Yougoslavie avaient effet sur l’ensemble des républiques qui constituaient ces deux Etats fédéraux aujourd’hui disparus. L’accès à l’indépendance de certaines républiques, à partir de 1990, a eu un effet équivalent au Brexit.
Pour chaque république devenue indépendante, le principe a consisté à reconnaître les marques soviétiques ou yougoslaves existantes comme marques nationales, à condition que leurs titulaires déposent dans un délai fixé une requête à cet effet et acquittent, à cette occasion, une taxe auprès de l’office du nouvel État indépendant.
Ceci valait tant pour les marques enregistrées directement auprès des Offices soviétiques ou yougoslaves que pour celles enregistrées par le biais d’une désignation de l’URSS ou de la Yougoslavie dans le cadre d’un enregistrement international.
Les marques ainsi transformées en marques nationales produisaient leurs effets dans ces nouvelles républiques, tout en y conservant l’ancienneté des droits des marques originelles dont elles étaient issues. Elles sont depuis lors renouvelées régulièrement en tant que marques ukrainiennes, géorgiennes, croates, slovènes, etc.
Ainsi, un accord UK / UE pourrait prévoir que les titulaires de marques de l’Union européenne ou de modèles communautaires peuvent déposer des requêtes et acquitter une redevance, dans un délai fixé, afin que les droits attachés à ces marques et modèles continuent de produire des effets sur le territoire britannique, en conservant là aussi l’ancienneté des droits qui y sont attachés.
Cette solution aurait le mérite d’être assez simple en pratique et de préserver au Royaume-Uni les droits et effets attachés encore à ce jour aux titres européens existant.
Un scénario qui ne respecterait pas les droits acquis par les titulaires de marques ou modèles européens aurait bien entendu des effets catastrophiques en terme de sécurité juridique et reviendrait à exproprier les titulaires de droits acquis sur le territoire britannique via des titres européens à effet unitaire.
Outre que cela obligerait le Royaume Uni à les indemniser, la crédibilité de cet État serait gravement atteinte. Ce n’est certainement pas ce que recherche le nouveau Cabinet de Theresa May.
On peut estimer que la situation n’évoluera pas avant quelque temps !
Nous interviendrons pour vous informer en temps et en heure des décisions qui seront prises.