Contrefaçon : contenu VS contenant

Il est bien connu que tout ce qui brille n’est pas or et cela est évidemment éminemment vrai en matière de contrefaçon.

Mais, alors qu’il est encore relativement facile de reconnaître à l’œil nu qu’un sac à main monogrammé, qu’un T-shirt d’une marque de sport mondialement connue ou une ceinture en « alligator véritable » ne sont en réalité que des faux grossiers, les choses se compliquent rapidement lorsqu’il s’agit de déterminer si la montre de plongée de luxe est bien étanche à 1000 m, si le boulon aéronautique que l’on tient dans le creux de sa main est bien réalisé dans l’alliage de titane prescrit par le fabricant, si la seringue de vaccin antigrippe contient bien le principe actif recherché ou si la bouteille de Grand Cru Classé ne contient pas en réalité un vin beaucoup moins noble.

Si dans le dernier cas, un amateur averti peut avoir la chance d’être rapidement fixé après la première gorgée, il n’en va pas forcément de même pour les contrefaçons de médicaments ou de produits hi-tech que seuls les spécialistes arrivent à déceler au bout d’une longue batterie de tests et d’analyses complexes et coûteuses en temps, matériel et personnel.

On rappellera que le cas des médicaments est d’autant plus critique que c’est la santé du patient, en général déjà bien malade ou en passe de l’être, qui est directement mise en jeu.

En effet, rien ne ressemblant plus à un simple cachet qu’un autre cachet, on ne compte malheureusement plus les cas de pilules, notamment les fameux petits losanges bleus, achetées de préférence via internet, et interceptés par la police ou les douanes qui s’avèrent, après un tour au laboratoire d’analyses, ne pas présenter les principes actifs espérés. Bien entendu, lorsque les prétendus médicaments ne sont pas simplement vendus comme de banals comprimés anonymes en vrac, il faut également imiter tout le conditionnement du fabricant autorisé, généralement en violant au passage le droit des marques (pour le nom du médicament et/ou du laboratoire fabricant) et, tant qu’on y est, celui des dessins et modèles lorsque le design, par exemple d’un inhalateur de poche, est également copié.

Résultat : Des quantités d’emballages et de contenants plus ou moins réussis de médicaments qui ne contiennent pas, pas assez ou parfois même trop de principe actif, un principe actif détérioré ou impur, le mélange final étant alors complètement ou partiellement inefficace sur le plan thérapeutique voire même toxique dans le cas où les impuretés ou produits de substitution sont eux-mêmes dangereux pour la santé1.

A la contrefaçon, il faut parfois ajouter le problème de la fraude lorsque le fabricant triche non seulement sur l’origine, le design et/ou les caractéristiques techniques brevetées mais également sur la qualité des produits commercialisés (résidus de produits toxiques dans les vêtements ou chaussures ; accessoires, jouets ou pièces détachées automobiles non-conformes aux normes de sécurité ; aliments et boissons frelatés, matières premières radioactives…), ces cas étant généralement tout aussi difficiles ou impossibles à détecter par le consommateur lambda.

On comprend donc aisément la nécessité d’un moyen pratique, efficace et bon marché permettant aux différents destinataires (intermédiaires, consommateurs, contrôleurs…) des marchandises suspectes s’assurer de l’adéquation entre contenu et contenant.

Un exemple de solution actuellement développé permettant de différencier efficacement le vrai du faux consiste dans le marquage des produits authentiques par différents dispositifs spécialement conçus à cette fin et dont la technologie ne cesse de s’améliorer.

Il s’agit dans ce cas de contrôler certains éléments d’authentification d’un produit suspect afin de déterminer avec un degré de certitude suffisamment élevé si l’on est en présence d’un original ou d’une copie.

Comme exemples on peut citer les témoins d’effraction ou dispositifs d’inviolabilité (bagues, bouchons, capsules, étiquettes, vignettes, films thermo-rétractables, scellés…), qui permettent normalement en un clin d’œil de s’assurer que le conteneur n’a pas déjà été ouvert et donc que le produit qui y est contenu est d’origine. Ces éléments sont conçus de telle manière qu’une fois mis en place sur l’emballage, par exemple sur le col d’une bouteille, il devient impossible d’accéder au contenu dudit emballage sans laisser de trace visible sur ledit élément ou de le détruire. Il s’agit d’une méthode relativement simple et efficace qui trouve particulièrement son application pour des produits de grande distribution présentant une faible valeur marchande (bouteilles de soda, produits alimentaires, cadeaux publicitaires, produits jetables…).

D’autres techniques faisant appel aux sens de l’utilisateur comprennent :

  • les hologrammes (hélas également de plus en plus imités voire copiés),
  • les encres spéciales (p. ex. sur les billets de banque) dont l’aspect, le contraste ou les couleurs changent en fonction de l’inclinaison, de la température, de la pression, du rayonnement lumineux qui les éclaire…
  • des impressions sécurisées dont la finesse et la couleur sont très difficiles à copier,
  • les numéros d’identification ou codes propres à chaque produit (type n° de série automobile),
  • les impressions directement sur le médicament ou l’aliment destiné à être séparé de son emballage, et
  • les filigranes des produits en papier ou fibreux.

Une autre famille de techniques comprend celles qui nécessitent un instrument adapté et un personnel formé pour décider si le produit est authentique ou non. On peut citer les éléments de marquage optiques qui ne sont visibles qu’avec un instrument de lecture ad hoc (loupe, filtre, décodeur, rayons spécifiques, réactifs chimiques, dispositifs magnétiques, étiquettes RFID…) ou le produit lui-même dont on mesure, sur place, une caractéristique technique particulière qui sert alors de moyen d’authentification.

Cette vérification peut, dans les cas les plus complexes et donc les plus sûrs, également être effectuée en laboratoire pour des marqueurs ajoutés au produit ou intrinsèques à ce dernier. On peut citer à titre d’exemples les marqueurs physiques (particules ajoutées, impuretés spécifiques…), biologiques (bactéries, balises, ADN…) ou physico-chimiques (pureté, isomères, isotopes…).

Les systèmes dits « Track & Trace » permettent d’utiliser le suivi logistique d’un produit, en relation notamment avec des étiquettes RFID pour retracer le chemin parcouru par ce dernier et en déduire son authenticité.

Enfin, la norme NF ISO 12931 de septembre 2012 peut s’avérer être ici un outil précieux puisqu’elle permet de définir les critères de performance des solutions techniques pour la protection contre la contrefaçon des biens matériels. Le contenu de cette norme (le vrai !) peut être commandé via le lien http://www.boutique.afnor.org/normes-produits-edition.

1 Pour des exemples concrets de médicaments faux, faussement étiquetés, falsifiés, contrefaits : http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs275/fr/