Un accroc aux marques comprenant un acronyme

Le Code de la propriété intellectuelle prévoit que peuvent constituer une marque « les dénominations sous toutes les formes telles que : mots, assemblages de mots, noms patronymiques et géographiques, pseudonymes, lettres, chiffres, sigles« .

La jurisprudence constante reconnaît la validité de marques composées d’un sigle ou acronyme seul, sous réserve que celui-ci soit arbitraire au regard des produits et services visés.

La question se pose toutefois de savoir si les marques composées par un sigle ou acronyme suivi de sa signification sont valables.

Longtemps, la jurisprudence a semblé reconnaître la validité de telles marques lorsque le sigle lui-même est arbitraire, même si l’expression correspondant à ce sigle présente dans la marque est descriptive. Par exemple, la Cour d’appel de Nîmes a reconnu dans un arrêt du 31 mars 2011 la validité de la marque « P.S.I. PROJET DE SOINS INFORMATISE » pour des progiciels de gestion informatique de dossiers de soins, médicaux et paramédicaux.

Cette pratique présentait néanmoins le risque de permettre l’enregistrement et la protection de marques composées d’une expression courante descriptive, par un simple artifice consistant à ajouter à cette expression le sigle composé de la première lettre de chaque mot.

Cette situation semble aujourd’hui révolue.

La Cour de Justice de l’Union européenne a été interrogée par deux questions préjudicielles relatives à la validité des marques « Multi Markets Fund MMF » et « NAI – Der Natur-Aktien-Index ». Dans chaque cas, le sigle lui-même était arbitraire mais l’expression correspondante était descriptive des services visés.

Dans un arrêt du 15 mars 2012, la Cour a précisé que n’est pas valable « une marque verbale composée de la juxtaposition d’un syntagme descriptif et d’une séquence de lettres non descriptive en elle-même, si cette séquence, du fait qu’elle reprend la première lettre de chaque mot de ce syntagme, est perçue par le public comme une abréviation dudit syntagme et que la marque en cause, considérée dans son ensemble, peut ainsi être comprise comme une combinaison d’indications ou d’abréviations descriptives qui, partant, est dépourvue de caractère distinctif ».

Restait à savoir comment cette solution de principe allait être appliquée.

Au niveau européen, la Division d’annulation de l’Office communautaire des Marques a ultérieurement annulé la marque « VPO Voltage Power Optimisation », initialement acceptée à l’enregistrement pour désigner des produits et services dans le domaine de la gestion de l’énergie.

En décembre 2013, l’Office communautaire des Marques a précisé avoir modifié sa pratique et confirmé que de telles marques, généralement acceptées à l’enregistrement auparavant, seront désormais considérées comme descriptives car le sigle et l’expression sont destinés à s’expliquer mutuellement.

Au niveau français, cette solution semble également appliquée.

Le Tribunal de Grande Instance de Paris a par exemple considéré dans un jugement du 17 octobre 2013 que la marque « STRATEGIES & INTERACTIONS EN COMMUNICATION – SIC » – n’est pas valable pour des services de formation, management, communication en entreprises et relations humaines, l’ajout de l’acronyme SIC à la suite d’une expression descriptive de la nature des services visés ne pouvant suffire à conférer un caractère distinctif à la marque dans son ensemble.

Les titulaires de marques constituées par un sigle ou acronyme doivent désormais être très prudents lors du choix de la forme sous laquelle la marque sera déposée et utilisée.